Élections françaises : La France suivra-t-elle l'exemple italien de Meloni ?
Peter Garnry
Chief Investment Strategist
Points clés
- Macron appelle à des élections anticipées : En réponse aux mauvais résultats de son parti aux élections législatives européennes, Emmanuel Macron a décidé de convoquer des élections anticipées. Cette décision vise à empêcher les partis d'opposition de dissoudre son gouvernement plus tard dans l'année, bien que certains la jugent imprudente.
- Situation électorale actuelle : Le Rassemblement National (RN), dirigé par Marine Le Pen et Jordan Bardella, est actuellement en tête avec environ 35 % des voix, selon un chiffre composite de Bloomberg. Il est suivi par le Nouveau Front Populaire (NFP) de gauche avec 28 %, et le parti Renaissance de Macron et ses alliés avec 21 %. Les élections, qui se déroulent en deux tours les 30 juin et 7 juillet, pourraient entraîner un changement politique majeur en France, même si Macron restera président jusqu'à la fin de son mandat en 2027.
- Réactions du marché : L'incertitude entourant les élections a provoqué une réaction négative des marchés financiers. Les actions françaises ont sous-performé et les spreads des obligations à 10 ans entre la France et l'Allemagne se sont élargis. Cependant, certains observateurs estiment que cette réaction est excessive, en se basant sur l'exemple de l'Italie sous Giorgia Meloni, dont les politiques, initialement redoutées, se sont révélées plus pragmatiques que prévu.
Un changement politique s'annonce pour la France
La France se dirige vers des élections anticipées après que Macron a réagi rapidement aux résultats dévastateurs de son parti lors des élections législatives européennes. Son parti ayant obtenu près de la moitié des voix du Rassemblement National, il a expliqué dans une interview que cette décision était nécessaire pour empêcher les partis d'opposition de dissoudre son gouvernement plus tard dans l'année.
L'élection française est un processus en deux tours (le 30 juin et le 7 juillet). Actuellement, le Rassemblement National est en tête avec près de 35 % des voix, selon Bloomberg. L'alliance de gauche Nouveau Front Populaire est deuxième avec 28 %, et le parti Renaissance de Macron et ses alliés est troisième avec 21 %. Bien qu'il soit trop tôt pour se prononcer définitivement, un changement politique majeur en France semble probable.
Jusqu'à présent, les marchés ont réagi négativement à l'incertitude, avec des actions françaises en baisse et une augmentation des spreads des obligations d'État françaises par rapport aux obligations allemandes. Dans un article du Financial Times, Stéphane Boujnah, PDG d'Euronext, a conseillé aux chefs d'entreprise français de rester calmes, car de multiples institutions limitent les ambitions politiques en France. Souvent, les marchés réagissent de manière excessive aux événements politiques, et la réalité se révèle moins dramatique.
Les leçons tirées du gouvernement Meloni en Italie
Giorgia Meloni, Premier ministre de l'Italie depuis octobre 2022, pourrait servir de guide pour interpréter la politique française post-élections. Initialement, son gouvernement eurosceptique et ses politiques économiques étaient redoutés. Cependant, son administration a adopté une approche pragmatique, respectant le conservatisme budgétaire et poursuivant les réformes économiques post-pandémiques de son prédécesseur.
Meloni a mis en œuvre des politiques économiques en ligne avec les exigences de l'UE, rassurant les marchés. Les actions italiennes ont atteint des sommets historiques et les rendements obligataires se sont bien comportés. Malgré sa position eurosceptique, Meloni a collaboré avec l'UE sur des sujets clés, comme l'immigration et les fonds de relance de l'UE, et lancé des initiatives internationales ambitieuses.
L'administration Meloni s'est avérée plus pragmatique qu'on ne le craignait. Il est probable que le Rassemblement National, s'il gagne les élections françaises, adoptera également une approche pragmatique. Cela pourrait offrir des opportunités d'investissement dans les actions et les obligations françaises, à l'instar de ce qui s'est passé sur les marchés italiens.
Deux graphiques capturant la vision du marché sur l'élection française
Les craintes actuelles du marché concernant une victoire du Rassemblement National sont bien exprimées dans deux graphiques sur les actions et les obligations d'État françaises.
Le premier graphique montre la faible performance des actions françaises cette année, impactée par la baisse de la demande de produits de luxe et les résultats des élections législatives européennes. Le marché français des actions n'a progressé que de 4,6 % depuis le début de l'année, contre 10,8 % pour l'indice européen STOXX 600 et 15,1 % pour les actions italiennes. Les actions françaises, autrefois évaluées avec une prime par rapport à l'Europe, sont maintenant décotées. Elles sont valorisées à 12,9 fois les bénéfices prévisionnels à 12 mois, contre 13,7 fois pour les actions européennes et 9,0 fois pour les actions italiennes.
Le marché obligataire montre également l'inquiétude des investisseurs institutionnels. Depuis l'appel à des élections anticipées, le spread France-Allemagne à 10 ans s'est élargi à environ 80 points de base, un niveau inégalé depuis la crise de l'euro en 2012. Cela reflète un marché préférant la prudence, en attente des signaux que Le Pen et Bardella enverront après les élections. Les investisseurs s'inquiètent des relations de la France avec l'UE et de la trajectoire budgétaire, anticipant une possible augmentation des déficits sous un gouvernement RN. Toutefois, cette spéculation pourrait être prématurée, et le marché pourrait se retourner rapidement, comme en Italie sous Meloni.
Sur les marchés des devises, les traders achètent des protections à la baisse sur l'euro pour se prémunir contre un éventuel impact négatif des élections françaises sur l'UE et l'euro. Cependant, les prévisions pessimistes sur l'euro se réalisent rarement. Nous pensons que le marché réagit de manière excessive à l'élection française, et que l'exemple de l'Italie sous Meloni montre que les contraintes institutionnelles freinent souvent les ambitions politiques.
Réaction des actions françaises depuis les résultats du Parlement européen
L'analyse des performances individuelles des actions du CAC 40 depuis les élections législatives européennes montre clairement les attentes du marché.
En bas de l'échelle, on trouve les valeurs financières comme Société Générale, Crédit Agricole, et BNP Paribas, en raison des inquiétudes sur la réglementation financière et la croissance économique future sous un gouvernement RN. Parmi les actions les moins performantes, on trouve aussi des services publics comme Engie et Veolia Environnement, en raison des craintes concernant les changements réglementaires et les politiques énergétiques.
En haut de l'échelle, les valeurs comme EssilorLuxottica, Schneider Electric, Airbus, Michelin, Accor, Danone, Safran, et Vivendi ont bien performé. Les marchés pensent que ces entreprises pourraient bénéficier d'un environnement politique favorisant l'économie nationale et protégeant l'industrie française. La bonne performance de Safran indique que le marché n'est pas inquiet pour le soutien à l'industrie de la défense.
Niels Bohr a dit : « Il est difficile de faire des prédictions, surtout pour l'avenir. » Cela s'applique particulièrement aux marchés financiers. L'opinion des marchés exprimée dans les valeurs individuelles françaises offre une orientation précieuse aux investisseurs. La dynamique actuelle se poursuivra-t-elle après les élections, ou verrons-nous une résorption des divergences ? C'est la question clé que tout investisseur doit se poser.
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