On sent la pression
Christopher Dembik
Responsable de l'analyse macroéconomique
Les chiffres de l’emploi américain aujourd’hui devrait maintenir la pression sur la Réserve Fédérale américaine (Fed). Mais l’hypothèse d’une hausse du taux directeur de 50 points de base en mars est peu probable. L’emploi tient très bien. Il y a encore près de deux postes ouverts au recrutement par chômeur. Les flux de démissions, qui sont propices à une accélération des salaires, ralentissent mais restent à un niveau élevé. En outre, les entreprises ne veulent pas se séparer de leurs salariés, par crainte de ne pas parvenir à en trouver. Résultat : le taux de lay-offs est seulement à 1,1% dans le secteur privé. L’enquête ADP sur l’emploi privé publiée mercredi a aussi confirmé une dynamique bonne en février, avec 242 000 nouveaux postes créés. Il y a des points de fragilités (les petites entreprises, les secteurs de la construction et du transport). Mais ceux-ci sont faibles. Au niveau des ETI et des grandes entreprises, les créations d’emplois se poursuivent à un rythme impressionnant. Le Beige Book valide également le scénario d’une hausse de 25 points de base du taux directeur ce mois-ci (l’emploi est en forme mais les finances des ménages se dégradent et l’activité économique ralentit). Clairement, les Etats-Unis ne sont pas confrontés à un scénario de récession imminente. C’est dommage, dans un sens, car une récession, on sait gérer et surtout cela aurait pu permettre de faire refluer plus rapidement l’inflation.
- Il n’y avait pas beaucoup de statistiques hier. En Chine, l'inflation a fortement baissé en février, augmentant seulement 1% le mois dernier, soit son niveau le plus bas depuis un an. L'augmentation des prix alimentaires est d'à peine +2,6% sur un an alors qu'ils tirent largement le niveau d'inflation en Europe. Les économistes s'attendent toutefois à un rebond dans les mois à venir, mais sans commune mesure avec ce qui existe dans les économies développées.
- En se basant sur les positions des investisseurs institutionnels et des traders, il n’y a que quelques matières premières qui sont en situation de survente (ce qui ouvre la porte à un rebond). C’est en particulier le cas de l’argent et du blé. Les prix du gaz au niveau européen sont également très bas. Ils évoluent actuellement avec une décote de 66% par rapport à leur moyenne mobile à 200 jours (cela va peut être inciter des opérateurs à se porter à l’achat). En outre, il faut s’attendre à une hausse des cours du soja. L’Argentine, qui est le premier exportateur mondial (soja sous forme de farine ou d’huile), a subi de plein fouet la sécheresse de 2023 (dont les proportions sont uniques du point de vue historique). Selon les autorités américaines, la production de l’Argentine devrait chuter de 35% - soit plus que pendant les épisodes de sécheresse de 2009 et de 2018.
Les résultats d’entreprises continuent avec Daimler Truck (camions et autobus), AIA Group (compagnie d’assurance basée à Hong Kong) et Oracle (gestion de base de données).
Outre les chiffres de l’emploi aux Etats-Unis en février (consensus à 200 000 créations de nouveaux postes contre un bond inhabituel à 507 000 en janvier), l’attention se porte sur la rencontre bilatérale entre le Premier ministre britannique R. Sunak et le président français E. Macron. C’est la première rencontre de ce type entre les deux pays depuis 2018. Parmi les sujets à l’agenda : l’immigration, le changement climatique et la sécurité. Mais on sait que l’économie n’est jamais loin, d’autant plus que le Royaume-Uni et l’Union Européenne ont tourné la page d’années de tensions à propos de l’Irlande du Nord avec la conclusion du Windsor Framework la semaine passée. Cet accord est important pour deux raisons principales : (1) Il vise à maintenir l’Irlande du Nord dans le marché unique des marchandises avec l’UE. Concrètement, cela va faciliter la vie des entreprises qui commercent entre la Grande Bretagne et l’Irlande du Nord. Mais il ne faut pas s’attendre à ce que cela entraîne un boom des échanges commerciaux (car l’Irlande du Nord, c’est juste 2% de la production britannique) ; (2) Cela pourrait peut-être (un jour) ouvrir la porte à un Brexit inversé. Après tout, le Premier ministre britannique a indiqué que l’Irlande du Nord est dans la meilleure situation possible en pouvant bénéficier du marché unique européen. Les prochaines élections générales sont prévues d’ici janvier 2025. Les travaillistes sont en tête d’après les sondages. Mais ni eux ni les conservateurs ne semblent vouloir rouvrir le dossier épineux du Brexit (contrairement aux citoyens britanniques qui s’interrogent de plus en plus sur la pertinence de ce choix, au regard des derniers sondages).
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