Savoir se contenter de peu
Christopher Dembik
Responsable de l'analyse macroéconomique
Le franchissement des 6000 points la semaine dernière sur le CAC 40 a été un signal extrêmement important pour le marché. Nous observons que les investisseurs (à la fois les institutionnels et les particuliers) se positionnent à l’achat. Les niveaux de valorisation sont attractifs. C’est indéniable. En outre, tous les facteurs de risque (et ils sont nombreux) sont déjà intégrés dans les cours. Le seul risque qui ne l’ait pas, ce serait d’avoir un astéroïde frappant la Terre. Il est donc temps de regarder le verre à moitié plein et de profiter d’un marché très largement décoté. Nous restons convaincus chez Saxo Banque qu’il faut encore privilégier une stratégie de stock picking (c’est plus sage avec la baisse attendue des volumes). Il convient d’éviter les valeurs technologiques pour le moment car le potentiel de baisse n’est certainement pas encore fini (à moins de shorter ces valeurs, bien-sûr). Nous nous attendons à ce que la volatilité soit au rendez-vous dans les séances à venir : résultats d’entreprises, réunion de la Banque Centrale Européenne (BCE) et surtout risque politique en Italie. Au niveau des résultats d’entreprises, il faudra surtout regarder de près les projections pour les mois à venir (est-ce que le scénario d’une récession va prévaloir ?). Enfin, il faudra faire preuve de patience car les stars de la cote ne vont communiquer sur leurs performances qu’un peu plus tard (Apple, Amazon, Alphabet etc.).
- Aucune statistique importante hier.
- Dernières séances poussives pour le titre Reworld media (small cap avec une valorisation autour de 382 millions d’euros). Ce passage à vide n’a certainement pas vocation à durer. L’entreprise a récemment racheté douze marques digitales appartenant à TF1. C’est une belle opération qui permet de poser des bases solides pour l’avenir. Le titre vaut un peu moins de 7 euros (avec une baisse depuis le début de l’année de près de 8%). Il y a un beau potentiel de hausse à moyen terme, certainement proche des 9-10 euros. Il convient cependant d’être vigilant puisqu’il s’agit d’une small cap (dont avec les problèmes de liquidité que cela implique).
- Mercredi, le Premier ministre italien Mario Draghi va proposer sa démission au Parlement (à la fois à la Chambre haute et à la Chambre basse). L’histoire récente nous a appris qu’il est toujours difficile de prévoir avec certitude les conséquences d’une crise politique en Italie. Il y a cinq scénarios possibles : 1) Draghi reste en poste avec la même majorité. Mais cela impliquerait un changement de posture du Mouvement Cinq Étoiles de Giuseppe Conte qui est peu probable ; 2) Draghi réussit à former un nouveau gouvernement avec une majorité différente. C’est compliqué car le Mouvement Cinq Etoiles est incontournable du fait du nombre de députés qu’il a ; 3) Draghi décide de démissionner sans demander un vote du Parlement. C’est peu vraisemblable, à ce stade ; 4) Sous la pression du président italien Sergio Mattarella et de plusieurs partis politiques (comme le parti Italia Viva de Matteo Renzi), Draghi accepte de rester en poste un peu plus longtemps jusqu’aux élections générales de 2023. Il dirige un gouvernement de technocrates. C’est le meilleur scénario pour la zone euro. C’est certainement un scénario plutôt consensuel pour la plupart des partis politiques italiens ; 5) Draghi ne réussit pas à former un nouveau gouvernement ou il refuse de rester en poste. Des élections législatives anticipées doivent avoir lieu dans les 70 prochains jours (donc, en septembre). Selon les derniers sondages, le Mouvement Cinq Etoiles serait laminé. Un gouvernement nationaliste dirigé par Giorgina Meloni, à la tête de Frères d’Italie, pourrait gagner les élections. Ce serait, évidemment, le pire des scénarios pour la zone euro au pire moment (conditions financières moins accommodantes, volumes faibles, crise énergétique, inflation galopante etc.).
Jeudi, la BCE va augmenter son taux directeur de 25 points de base. Ce n’est en aucune façon une surprise. Nous pensons que la banque centrale a une fenêtre d’opportunité de six mois environ pour augmenter ses taux (avant qu’elle ne soit contrainte à adopter une approche plus dovish du fait du ralentissement économique à l’œuvre). Nous tablons sur une croissance fortement en baisse l’an prochain en zone euro, à 1 % contre 1,3 % selon les dernières estimations de la Commission Européenne (initialement, en mai dernier, la prévision de croissance pour 2023 se situait à 2,3 %). La BCE devrait aussi évoquer la mise en place de son outil anti-fragmentation. A ce stade, elle ne devrait dévoiler que des détails. Toutes les discussions portant notamment sur les conditions de déclenchement ne sont pas terminées. Les investisseurs seront également attentifs à tout commentaire portant sur la faiblesse de l’euro. Cependant, nous voyons mal ce que pourrait faire la banque centrale pour l’enrayer. Tout joue en défaveur de la monnaie unique : la crise énergétique en zone euro, le différentiel de politique monétaire entre les deux bords de l’Atlantique, les craintes de récession qui aboutissent à un repli sur les valeurs refuge (comme le dollar américain) etc. Il faut s’attendre à ce que la paire EUR/USD soit très volatile autour de la parité dans les séances à venir. Aucun élément (qu’il soit question d’analyse technique ou d’analyse fondamentale) ne permet d’envisager un rebond durable de la paire.
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