Macro Digest : Implications de la prise de contrôle du Credit Suisse par UBS
Steen Jakobsen
Directeur des investissements
Résumé: La prise de contrôle du Crédit Suisse par UBS ce week-end réécrit l'histoire des obligations d’entreprises en raison de l'annulation massive d'une partie de la dette du Crédit Suisse. Cette non-solution pourrait élever des préoccupations grandissantes.
Du jour au lendemain, comme vous le savez tous, UBS a racheté CS pour 3 milliards de dollars, mais dans le même temps, les 17 milliards de dollars d'obligations à risque du Crédit Suisse se sont retrouvés sans valeur (article de Bloomberg).
Il s'agit d'un marché obligataire de 250 milliards qui a été mis en place après la crise financière mondiale pour aider les banques sous-capitalisées en Europe à atteindre un capital Tier-1 solide. Dans le langage courant, ce marché est appelé Additional-Tier-1, AT1. Les fonds propres de catégorie 1 sont les fonds propres les plus élevés disponibles pour compenser les prêts irrécouvrables ou d’autres tensions du secteur financier. Les fonds propres de catégorie 1 correspondent aux bénéfices non répartis, aux actions ordinaires et, dans de nombreuses banques européennes, aux AT1.
Il s'agit probablement d'un mauvais indicateur, mais WisdomTree a un ETF qui suit spécifiquement ce marché (et notez que ce graphique date de la clôture de vendredi)… Le Crédit Suisse représentait un peu plus de 7 % de l'indice qui est maintenant évalué à ZERO.
L'inquiétude grandissante sur le marché s'est cristallisée ce week-end avec l'opération de rachat du Crédit Suisse : La Banque nationale suisse a, d'une seule main, mis tous les investisseurs en AT1. Dans un renflouement, les obligations AT1 seront réduites à zéro. Cela oblige à une réévaluation et probablement à une réévaluation massive des obligations CoCo à l'ouverture du marché en Europe demain.
Pour moi, il s'agit une fois de plus d'une réponse politique à court terme et à courte vue à un problème essentiel. Le système bancaire a été déresponsabilisé, car crise après crise, les régulateurs et les banques centrales ont accepté davantage de pertes cumulées et les exigences en matière de fonds propres sont restées faibles, insuffisantes et, pire encore, fondées sur des modèles internes conçus par les banques elles-mêmes.
Le modèle bancaire 3-6-3 (emprunt à 3 %, prêt à 6 % et terrain de golf à 15h) est mort en 2008 et a été remplacé par « Ingénierie financière » comme principal soutien auprès des clients, mais aussi comme outil le plus pointu de gestion des risques des banques. L’ingénierie financière au carré n’a jamais été une bonne idée et elle risque vraiment de faire échouer tout le modèle bancaire.
Financial engineering squared was never a good idea and it really risking a failure of the whole banking model itself.
Mise à jour sur le marché 00:20 CET :
Le marché s’est ouvert en début de négociation, stimulé par les swaps de liquidité des banques centrales et la non-solution sur CS-UBS. Ce mini-rallye peut durer une heure, une journée ou une semaine, mais au bout du compte, il faudra revenir sur le fait que les décideurs ont perdu leur crédibilité et que lorsque les investisseurs perdent confiance dans le système, de l’argent ira à des actifs tangibles et garantis, par exemple :
- L'or
- Obligations d'État à court terme
- Yen japonais (JPY)
Ce sont les gagnants les plus probables… demain si j’ai raison sur le « nouveau stress » dans AT1, alors l’EUR pourrait commencer à se vendre. Les grandes banques européennes (et du Royaume-Uni) ont d’importantes obligations de sociétés liées de catégorie 1 en circulation.
Le point de données à surveiller demain est l’indice sous-jacent du ETF Wisdomtree CoCo mentionné ci-dessus : L’indice Ibox Contingent Convertible Liquid.
Mise à jour tôt dans la matinée européenne (vers 8 heures du matin). Les valeurs financières japonaises et HSBC (qui pèse le plus lourd dans l'indice AT1 d'Iboxx) sont peut-être le meilleur indicateur de la situation pré-européenne.
HSBC est en baisse de -3,85% (à l'heure où nous écrivons ces lignes).
Banques japonaises :
Mizuho : -2.3 %
Sumitomo : -1.67 %
Mitsubishi : -1,84 %